Calmels et Le Viala : L'énigme de la fontaine pasticopale sur le chemin des évêques

Rédigé le 22/03/2023


Pour rejoindre leur résidence secondaire de Saint-Izaire, chaque évêque de Vabres longeait la Plaine de Bédos, franchissait le gué sous Le Cambon, traversait le bois noir de sinistre réputation et parvenait enfin au Château de sa villégiature en franchissant Le Dourdou une seconde fois sur un pont construit par le diable.*
Il est dit qu'une fontaine énigmatique se trouvait sur ce parcours dont la principale curiosité venait de son goût pasticopal.
La légende trouvant souvent ses racines dans une vérité, je me suis mis en devoir de la retrouver.
Sur la mule de mon copain Francis, pape pour cette fois, j'ai brinquebalé au trot de fondrières en rochers pointus vers le lieu de sa possible émergence.
Pierre d'Olargues, premier évêque de Vabres en 1317 passant par là avec son cortège s'y désaltérait longuement au dire de l'histoire.
Au vent du plô un parfum pasticopal nous fit stopper net. Au sombre d'une ronceraie gouttait cette énigmatique ensorceleuse, tendant un verre qui virait au jaune pour le plus grand bonheur du buveur.
J'ai consommé plus que de raison ce breuvage étonnant au point de voir apparaître ce premier évêque m'affirmant que le verre me serait toujours servi et que donc il fallait croire en la bonté de Dieu.
Je me promettais déjà de revenir souvent vers la source pour entretenir le miracle et gagner le ciel.
L'histoire dit cependant qu'en l'an 1453 Bernard le Blanc 11ème évêque  passant à son tour sur ce chemin contesta la nature de cette eau l'associant plutôt à un vin de messe pris en coupe lors de la communion.
1519 : Renaud de Martigny 14ème prélat, ajouta au trouble la voulant apéritive admettant qu'on pouvait se méprendre sur la couleur.
C'était sans compter sur l'avis de Georges d'Armagnac, 15ème évêque du diocèse de Vabres en 1536 qui attribuait une vertu digestive à ce liquide alors que Pierre d'Olargues l'avait décrite comme apéritive.
Moi, simple paroissien désireux de sauver mon âme, je m'en remets au conseil de l'évèque François III de la Valette Cornusson confirmé en 1622 20ème de la longue liste : «Il n'y a pas de raison de se priver d'amour », voilà pourquoi je grimpe là haut picoler tranquille ou à  l'auberge du même nom dans le charmant village de Saint-Izaire.
*Pour franchir ce pont en direction du village fallait pactiser avec le malin sous peine d'avoir la vue troublée une fois l'ouvrage franchi. Mais Saint-Izaire veillait et vous rendait la vue pourvu que vous l'honoriez de quelque obole. Si vous partiez vers Vabres sans contrat avec Lucifer vous deveniez méchant et colérique. En passant en vue de Notre Dame de Calmels la source sous la chapelle vous rendait votre bonne humeur en échange de quelques prières. Les opticiens plus efficaces que Saint-Izaire, la source de Calmels ayant aujourd'hui disparu, le diable se réjouit à nouveau d'entretenir la discorde sur le pont.  
J. Constans